De nos jours, aux Antilles, on appelle canari, une grande marmite.
Dans la tradition caraibéenne, le terme canalli est à l'origine un récipient de terre cuite qui permet de cuire à petit feu les aliments.
Le mot canali ou canalli a très souvent été cité par les chroniqueurs de l'époque.

Dans l'Anonyme de Carpentras, un manuscrit anonyme qui porte le titre Relation d'un voyage infortuné fait aux Indes occidentales par le capitaine Fleury avec la description des îles qu'on y rencontre par l'un de ceux qui fit le voyage, 1618-1620, l'auteur nous fournit la plus ancienne source d'informations sur les peuples Kalinagos des Petites Antilles.
On y retrouve le canali en terre cuite "Et lorsqu'elles veulent faire du vin, elles ont de grandes terrines qui se nomment canali qui ne servent à autre usage et contiennent aucune près d'un muiz (ancienne mesure appelée muid : environ 268 litres) et hautes de même, dont le fond est comme une assiette, s'élargissant toujours jusqu'au bout, qui a quelquefois quatre ou cinq pieds de diamètre (entre 1,30 et 1,60 mètre). Il y en a aussi d'autres plus petites qui servent lorsque leur festin n'est guère grand."

Nous retrouvons le canalli chez le Père Raymond Breton, qui dès son arrivée en 1635, se fixa comme objectif l'évangélisation des Caraïbes. Il vécut parmi eux dans un de leurs villages en Dominique, celui d'Hallelena dit le capitaine Baron. Il a laissé des écrits d'une grande importance dont un dictionnaire caraïbe-français. Le mot canalli y désigne le grand vaisseau de terre pour faire les vins, en forme de chapeau de chinois retourné, à la pointe aplatie; son diamètre moyen était d'une quarantaine de centimètres et sa profondeur, de quinze à vingt centimètres. Ce mot canalli était utilisé par les femmes tandis que les hommes l'appelaient monca. Les femmes crachaient le manioc dans le canalli plein d'eau, ce contenu fermentait et devenait leur ouicou, l'alcool de manioc.

Le Père Maurice Barbotin suppose aussi que le canalli servait aussi à donner à boire aux morts, car chaque fois que les archéologues trouvaient une sépulture en bon état, il y avait un canari retourné dans la position d'un chapeau de chinois.
Autre usage du canalli selon le Père Breton : lors des cyclones, les Caraïbes cachaient les tout petits bébés sous les plus grands canaris pour les mettre à l'abri de la pluie et du vent, en raison de sa forme qui n'offrait pas de prise aux rafales.

Les grandes poteries culinaires, semblables aux grandes terrines, ont reçu le terme générique de canari dans les ouvrages postérieurs.
Pour Maurile de Saint-Michel, le canari sert à faire bouillir les aliments.
Nous trouvons dans les écrits de Rochefort : Ils ont des canary fort grands et d'autres (...) fort petits qui servent au ouicou et au taumali.
Laborde écrit : le canari, pot en terre.
C'est ainsi que le mot et l'ustensile canalli sont arrivés jusquà nous...

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